Communiqué de presse
 

Une espèce végétale redécouverte en Belgique

après plus de 150 ans d’absence


Meise - 11 avril 2019
 
Le monde des plantes réserve parfois d’heureuses et curieuses surprises ! Le dernier numéro en ligne de la revue de botanique Dumortiera vient de sortir de presse. Un des articles nous apprend la redécouverte en Belgique, après plus de 150 ans, du grand polycnème (Polycnemum majus), une espèce végétale de la famille des Amaranthaceae qui était considérée comme éteinte depuis longtemps en Belgique. Mais un spécimen d’herbier du Jardin botanique de Meise, numérisé et rendu public sur la plate-forme www.botanicalcollections.be, a attiré l’attention de botanistes. L’étiquette de ce spécimen d’herbier datant de 1866 était suffisamment documentée pour permettre de localiser le site historique. Et plus d’un siècle et demi plus tard, la surprise est au rendez-vous : une population de Polycnemum majus y subsiste toujours !
 
Les collections d'herbiers constituent une source importante et sous-estimée de données historiques. Depuis 2018, l'herbier belge du Jardin botanique de Meise riche de plus de 300.000 planches a été numérisé et peut être consulté sur www.botanicalcollections.be. Cette plate-forme accessible gratuitement en ligne rend accessible les spécimens d'herbiers, facilitant les recherches historiques et actuelles les concernant. Et, parfois, cela mène à de belles découvertes...

 

L’histoire d’une redécouverte

 

En 2018, un des botanistes auteur de l’article publié dans Dumortiera recherche sur la plate-forme en ligne www.botanicalcollections.be des spécimens d'herbiers d'espèces végétales considérées comme menacées ou éteintes en Belgique. En août 2018, un spécimen de Polycnemum majus de l'herbier G. Dens daté du 4 septembre 1866 attire son attention… Cette espèce est considérée comme éteinte en Belgique depuis 1946. Les étiquettes qui accompagnent les feuilles d’herbier comportent généralement des informations sur la plante et sa localisation. Et dans le cas présent, l'étiquette comprend une description manuscrite du site « Côteaux schisteux. Rochefort, au lieu-dit le Tige » (http://www.botanicalcollections.be/specimen/BR0000012434343). L'emplacement précis et la date de collecte sont confirmés par une autre planche d’herbier tirée d’un herbier publié et distribué par les botanistes belges A. Thielens et A. Devos. Les étiquettes de ces deux collections indiquent en outre que les spécimens ont été collectés par François Crépin, célèbre botaniste de la région rochefortoise et auteur de la flore de référence utilisée par tous les botanistes belges au 19e siècle.

 

Des recherches géographiques révèlent alors que 'Le Tige' est encore aujourd’hui un toponyme utilisé dans cette région de la Calestienne. Les photographies aériennes des années 1970 à nos jours montrent en outre que le paysage est demeuré pratiquement inchangé au fil des ans. Il n’en fallait pas moins pour que notre botaniste se rende dans la région afin de rechercher le site et l’espèce disparue. Et le 9 septembre 2018, après une exploration minutieuse, la surprise est au rendez-vous : une population de Polycnemum majus est redécouverte !

 
La plupart des individus de Polycnemum majus étaient en train de fructifier au moment de la visite. Un échantillon de graines de ± 30 individus a été prélevé à des fins de conservation ex situ et sont conservées précieusement dans la banque de graines du Jardin botanique de Meise. Elles pourraient par exemple être utilisées pour réintroduire l’espèce si par malheur elle venait à disparaître du site.
 

Au départ d’une étiquette


L'étiquette du spécimen d'herbier de 1866, suffisamment détaillée, offrait une occasion unique d’essayer de relocaliser un site historique. Le ‘Tige d'Éprave’ n’a probablement pas subi de fortes perturbations au cours des dernières décennies. Le paysage rural et ouvert, resté en grande partie inchangé, a probablement permis à l'espèce de se maintenir. Toutes les conditions nécessaires sont encore réunies aujourd’hui pour assurer le maintien de la population de P. majus.


La redécouverte de cette espèce, permise grâce à la plate-forme botanicalcollections.be, illustre toute l’importance des herbiers et des données historiques qui permettent de mieux appréhender, des décennies plus tard, la distribution ancienne... mais aussi actuelle des espèces végétales !

 
En savoir plus :

A. Jacobs & S. Jacobs, Rediscovery of Polycnemum majus in Belgium [Dumortiera 114/2019 : 3-7] : https://doi.org/10.5281/zenodo.2621176

 

Contact presse : Ivan Hoste 02 260 09 59 ivan.hoste@jardinbotaniquemeise.be


Des photos sont disponibles sur https://drive.google.com/drive/folders/1Rv6X5cJz0pUqhF-nSw7giNb5CxK1XEEd?usp=sharing

 

ANNEXES
 

Encart 1   De Botanicalcollections à DoeDat


L’herbier du Jardin botanique compte 4 millions de planches d’herbier. Au cours des dernières années, l’institution  a numérisé 1,2 million de planches d’herbier comportant notamment tous les spécimens de Belgique (300.000 planches) et les a mises en ligne sur la plate-forme www.botanicalcollections.be. Cette année, un nouveau projet, financé par le gouvernement flamand, voit le jour pour numériser 1,4 million de spécimens supplémentaires.

Une deuxième plate-forme de sciences participatives DoeDat.be  vient en renfort de la première en invitant le grand public à retranscrire les données contenues - notamment sur les étiquettes d’herbier - afin de les rendre accessibles à la communauté scientifique. La saisie des données sous format numérique est importante car elle aide les chercheurs à avoir accès à des informations qui peuvent être utilisées pour toute une variété d'études.

 

En savoir plus : botanicalcollections.be et Doedat.be

 

Encart 2   Polycnemum majus en quelques mots...


Polycnemum majus est une espèce annuelle appartenant à la famille des Amaranthaceae. La plante mesure entre 5 et 30 cm et possède plusieurs tiges qui se ramifient au niveau du sol. La période de floraison dans le nord-ouest de l'Europe s'étend de juillet à octobre. L'espèce est présente dans des habitats secs, ouverts et perturbés avec des sols peu profonds, généralement calcaires, sablonneux ou caillouteux, tels que des champs cultivés de manière extensive, des terrains vagues et des prairies ouvertes.

 

L'aire de répartition de Polycnemum majus s'étend de l'Europe - principalement la région méditerranéenne et l'Europe centrale et orientale - au Moyen-Orient et à l'Asie centrale. En Belgique, P. majus est considéré comme éteint depuis 1946. Le seul endroit documenté en Flandre est Lanaken (prov. du Limbourg), où P. majus a été collecté en 1865 et 1866. Sept autres données sont documentées dans la partie sud de la Meuse, dans la région de Calestienne. La plupart des observations ont été effectuées dans les communes de Rochefort, Éprave, Han-sur-Lesse, Belvaux, Ave-et-Auffe, Genîmont et Lavaux-Saint-Anne (province de Namur). Cette région est connue pour sa mosaïque de bandes alternées de calcaires et de schistes calcarifères. La population redécouverte de Polycnemum majus est située à la limite de la réserve naturelle 'Tige d'Éprave' qui est adjacente à la route entre Éprave et Rochefort. Elle comprend une pente schisteuse et calcaire exposée au sud, recouverte d'une prairie calcaire semi-ouverte et semi-sèche.

 

Encart 3   Dumortiera

 

Le périodique en ligne Dumortiera publie des contributions botaniques - en néerlandais, français ou en anglais - sur la flore et la végétation de la Belgique et des zones limitrophes : plantes vasculaires, mousses, lichens, algues, champignons. Les thèmes abordés concernent l'évolution de la flore indigène et non indigène, des révisions de groupes difficiles ou méconnus, des clés complémentaires à la Flore de Belgique, des résultats d'inventaires de terrain, des communications brèves, etc.

 

En savoir plus : https://www.plantentuinmeise.be/fr/overig/Dumortiera (abonnement gratuit disponible en ligne)


 

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