[Science News] - Éros, un bel ambassadeur du Jardin botanique de Meise à Nancy

jeu. 19 juin

Depuis plusieurs jours, tous les regards étaient tournés vers « Éros ». Ce spectaculaire arum titan (Amorphophallus titanum), conservé au Jardin botanique Jean-Marie-Pelt à Nancy, préparait sa floraison tant attendue. Celle-ci a finalement débuté le 18 juin en fin de journée après que le public ait pu suivre en images, jour après jour, son impressionnante évolution sur le site du Jardin botanique de Nancy.

Âgé de 7 ans, Éros a atteint 162 cm de haut pour un poids de 21 kg. Sa floraison est un événement rare et spectaculaire. L’arum titan produit en effet la plus grande inflorescence du règne végétal… mais elle ne dure que 2 à 3 jours. Il faut donc être là au bon moment pour admirer ce phénomène fascinant et sentir l’odeur plus ou moins marquée de « cadavre » que la plante émet pour attirer les pollinisateurs naturels, de gros coléoptères.

De Meise à Nancy

Ce moment exceptionnel a été partagé par trois collaborateurs du Jardin botanique de Meise (de droite à gauche sur la photo) : Sarah Le Pajolec , Stijn Stappaerts et Olivier Maurin, tous spécialistes et passionnés de cette famille de plantes. Leur présence à Nancy n’était pas due au hasard : ils participaient au meeting annuel de la European Aroid Society, accueilli cette année par le Jardin botanique Jean-Marie-Pelt. L’occasion parfaite pour admirer la floraison… d’un spécimen bien connu d’eux.

Car Éros n’est pas un inconnu pour le Jardin botanique de Meise : il en est même originaire. Ce spécimen est l’un des trois jeunes plants offerts à Nancy en 2018, dans le cadre d’une collaboration entre nos deux institutions. Il provient de la collection d’arums titans de Meise, qui compte aujourd’hui plusieurs dizaines d’exemplaires, à différents stades de développement. Stijn et Sarah, jardiniers au Jardin botanique de Meise, ont d’ailleurs assisté en personne à la « naissance » de ce spécimen, il y a quelques années.

Olivier, quant à lui, mène des recherches scientifiques sur les Araceae, la famille des arums. Sa visite à Nancy avait un objectif scientifique : « Je compte prélever quelques échantillons dans les serres du Jardin botanique de Nancy pour des analyses ADN, et rencontrer des collègues pour discuter de nos recherches en cours sur l’évolution des Araceae », explique-t-il. « Nous allons aussi évoquer les échanges de plantes vivantes, afin d’en cultiver certaines dans le cadre d’un projet consacré à la tribu des Culcasieae - un groupe d’aracées - , et d’étudier leur développement et leur architecture de croissance. »

Un patrimoine végétal à préserver

L’arum titan est originaire des forêts tropicales de Sumatra, en Indonésie. Aujourd’hui, il est classé parmi les espèces en danger par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui estime qu’il reste moins de 1 000 individus matures à l’état sauvage. La destruction massive de son habitat naturel, due notamment à l’expansion des plantations de palmiers à huile, à l’exploitation forestière et aux incendies, menace ses populations.

En cultivant, étudiant et partageant les arums titans, les jardins botaniques comme celui de Meise et de Nancy jouent un rôle essentiel dans la préservation de cette espèce emblématique. Au-delà du spectacle botanique, la floraison d’Éros est aussi un symbole de coopération, de savoir-faire horticole et d’engagement pour la conservation.